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Pesticides / Néonicotinoïdes

#STOPNÉONICS : La France doit trouver un moyen de maintenir l’interdiction

Contrairement aux déclarations rassurantes du Premier Ministre, l’interdiction des pesticides néonicotinoïdes en France est loin d’être acquise, selon POLLINIS. Une nouvelle version du décret d’application de la loi pourrait obliger la France à faire des concessions importantes pour se mettre en conformité avec le droit européen.

Date : 29 juin 2017

Lundi dernier, le ministre de l’agriculture, Stéphane Travert, annonçait sur RMC vouloir revenir sur l’interdiction des néonicotinoïdes votée par le parlement français en juillet 2017. Le document de travail interministériel révélé par cette radio évoquait la possibilité de supprimer, par ordonnance, certaines restrictions d’usage des pesticides « tueurs d’abeilles ». Par un communiqué de presse lundi après-midi, les services du Premier ministre ont tenté d’éteindre la polémique : « Le gouvernement a décidé de ne pas revenir sur les dispositions de la loi de 2016 » . Il donnait implicitement raison à Nicolas Hulot, ministre de l’Environnement, qui avait déclaré un peu plus tôt : « On ne reviendra pas sur des acquis, je veux être le garant de ce que mon prédécesseur a acté. La loi existe. On ne va pas revenir sur la loi ».

Cette déclaration lénifiante est en réalité intenable. La « Loi pour la biodiversité et la reconquête des paysages », adoptée sous le précédent quinquennat, qui prévoit l’interdiction des néonicotinoïdes à partir de 2018, avec dérogations possibles jusqu’en 2020, ne pourra pas être appliquée si son décret d’application n’est pas conforme aux règlements européens ou si la procédure n’est pas respectée. En l’état actuel, elle ne respecte pas le cadre établi au sein de l’Union européenne en matière d’approbation des pesticides. Les lobbys de l’agro-industrie, extrêmement actifs sur ce dossier, pourront ainsi attaquer cette loi devant le Conseil d’Etat. Considérée comme acquise il y a quelques semaines encore, l’interdiction des néonicotinoïdes en France est en réalité compromise.

Conformément à la procédure de notification européenne, une nouvelle version du décret d’application de la loi française doit être envoyée à la Commission européenne avant le 3 août prochain. La France pourrait être obligée de faire des concessions importantes pour se mettre en conformité avec le droit européen.

« Nous craignons que cette nouvelle version du décret d’application conduise à assouplir la loi actuelle qui prévoit l’interdiction totale et pérenne des néonicotinoïdes, déclare Nicolas Laarman, délégué général de POLLINIS. Si le gouvernement d’Edouard Philippe a réellement l’ambition de maintenir cette interdiction, alors il doit faire preuve de créativité juridique et afficher une ambition politique sans faille. Avec le jeu de rôle et les déclarations divergentes de ce début de semaine, le gouvernement a choisi pour le moment de faire passer un message contradictoire. C’est mauvais signe. »

Nous avons été les premiers, dès le 15 juin, à tirer la sonnette d’alarme sur cette situation.

Notre pétition « #stopnéonics qui demandait aux ministres concernés de s’engager à maintenir cette interdiction, a recueilli près de 200 000 signatures et a lancé l’alerte. Malgré le refus de la Commission européenne de nous donner accès à son avis rendu le 3 mai 2017, nous avons réussi à l’obtenir et avons décidé de le rendre accessible au public sur notre site.

Le couac public du gouvernement lundi dernier montre qu’il n’y a pas de consensus au sein gouvernement sur l’interdiction des néonicotinoïdes. Alors que de nombreuses preuves scientifiques démontrent la toxicité létale (qui entraîne la mort) et sublétale (qui entraîne la capacité d’une population à se maintenir à l’équilibre) de ces substances pour les pollinisateurs, le ministre de l’agriculture a livré sur les ondes un argumentaire pro-néonicotinoïdes bien rodé, qui n’avait rien à envier à celui de l’agro-industrie. Stéphane Travert a ainsi évoqué “des solutions de substitution », avouant ainsi chercher à remplacer des molécules toxiques par d’autres tout aussi toxiques – et non par des techniques agricoles alternatives et durables. Quid de l’agroécologie ? De nombreuses études (INRA, ONU, IPBES…) prouvent que notre modèle agricole peut progressivement se passer de pesticides pour finalement les abandonner, tout en continuant à nourrir la population.

Ces atermoiements et prises de positions contradictoires au sein du gouvernement français sont inquiétantes. La France doit trouver un moyen de maintenir l’interdiction des pesticides néonicotinoïdes. Face à un problème urgent et nouveau, et lorsque l’Europe manque à ses obligations de protection des citoyen.ne.s, notamment face aux enjeux de santé publique et d’environnement, un « État pionnier » doit avoir le courage de montrer la voie et faire interdire des molécules toxiques aussi pour l’environnement, les pollinisateurs et l’avenir de notre agriculture.

JE SIGNE