Pesticides
Action « Printemps silencieux – Le Off du Salon de l’Agriculture »
Une centaine de scientifiques et de citoyen.nes de diverses disciplines venus de toute la France (Paris, Montpellier, Toulouse, Nice, Lyon, Marseille, Grenoble, Rennes, etc.) se sont rassemblé.es samedi 4 mars à Paris devant le Muséum National d’Histoire Naturelle, pour dénoncer les conséquences catastrophiques du recours massif aux pesticides et promouvoir un autre modèle agricole. Cette action est menée par Scientifiques en rébellion et Extinction Rebellion, avec les ONG Pollinis, Générations futures, Avenir Santé Environnement et Alerte des Médecins sur les Pesticides.
Une centaine de personnes, dont une majorité de scientifiques, soutenu.es par des représentant.es d’ONG, ont formé un cortège funèbre sous la bannière « Printemps silencieux : les pesticides tuent » lors d’une action organisée au Muséum National d’Histoire Naturelle.
Des prises de parole se sont succédé sur fond de die-in et au rythme du slogan « Non à l’écocide – Stop aux pesticides » et de coups de gong. Les artistes Red rebels, vêtues de rouge pour symboliser le sang des espèces éteintes, ont déambulé parmi les participant.es vêtu.es de noir et les scientifiques en blouses blanches.
Cette action, qui s’est déroulée en parallèle du Salon de l’Agriculture, fait référence au célèbre livre Printemps silencieux de la biologiste nord-américaine Rachel Carson, première lanceuse d’alerte en 1962 sur la dangerosité des pesticides de synthèse.
60 ans après la publication de cet ouvrage, les preuves scientifiques sur les ravages des pesticides s’accumulent, comme le rapportent notamment les expertises collectives menées par les instituts publics français : sur la santé humaine (INSERM 2013, 2021) et sur la biodiversité et les écosystèmes (INRAE-IFREMER, 2022).
En infiltrant les sols, l’air et les milieux aquatiques, les pesticides contaminent l’environnement et participent à l’extinction de masse des populations d’insectes et d’oiseaux. Cette extinction dramatique constitue une menace majeure qui risque de provoquer l’effondrement des écosystèmes et de la production agricole dont nos sociétés dépendent (United Nations Report, 2019).
« Les études scientifiques montrent une chute fulgurante d’abondance des insectes, dont certains pollinisateurs, qui atteint de 60 à 80% en Europe depuis 30 ans (Wagner et al., 2021 ; Goulson, 2023) ainsi qu’un déclin massif de 30% des populations d’oiseaux d’habitats agricoles en 30 ans en France (Fontaine et al., 2020) » alerte Benoît Fontaine, ornithologue pour Scientifiques en rébellion.
Les dommages des pesticides sur l’environnement se doublent du drame de leur toxicité sur la santé humaine, qui touche en premier lieu les professionnel.les du monde agricole.
« Les scientifiques documentent, encore et encore, que les pesticides neurotoxiques favorisent effectivement les troubles cognitifs et les maladies neurodégénératives, que les pesticides ressemblant à des hormones naturelles exercent bien des effets perturbateurs endocriniens sur tous les êtres vivants dont l’humain, ou encore que les pesticides épandus à moins de 1,5 km des habitations augmentent les risques de troubles du neuro-développement chez l’enfant (Gunier et al, 2017). » rappelle Laurence Huc, toxicologue, au nom de Scientifiques en rébellion.
Malgré ce constat scientifique accablant, la France figure parmi les principaux pays consommateurs de pesticides en Europe, avec plus de 70 000 t/an, et n’a respecté aucun de ses plans successifs de réduction de l’usage des pesticides (plans Ecophyto). Pire, les centaines de millions d’euros investis dans cet objectif ont abouti à une hausse de plus de 20% de l’utilisation de pesticides, une contradiction qui a été épinglée par la Cour des comptes en 2020.
Alors qu’un nouveau plan Ecophyto 2030 vient d’être annoncé par le gouvernement, sans aucun objectif de réduction des produits phytosanitaires, il est urgent que les responsables politiques prennent la mesure des constats scientifiques et engagent un changement radical de modèle agricole.
« Fort.es des résultats des recherches et scénarios d’agronomes et économistes, nous demandons des politiques publiques urgentes pour la transition radicale de nos modèles agricoles, vers l’agroécologie, une agriculture valorisant la biodiversité végétale et animale, avec une réduction de 60 % des pesticides pour 2030 et de 90 % d’ici 2050. Cela implique d’augmenter massivement les aides pour l’agroécologie et, en particulier l’agriculture biologique, développer l’agroforesterie, doubler les haies, augmenter les bandes enherbées, réduire de moitié l’élevage intensif en divisant par quatre les cultures fourragères annuelles (maïs, ensilage) au profit des prairies et cultures de légumineuses. Cela requiert une réduction de moitié de la consommation de viande. Stopper l’artificialisation des sols et les restaurer sont également essentiels pour stocker le carbone (Billen et al, 2021 ; Tibi et al., 2022 ; Solagro, 2022, Jacquet et al, 2022). », explique Florence Volaire, écologue, au nom de Scientifiques en rébellion.
Les dégâts dus à l’utilisation massive de pesticides ne sont qu’un des problèmes écologiques majeurs engendrés par l’agriculture intensive. La destruction des habitats, avec notamment la suppression de 70 % des haies depuis 70 ans, aggrave la perte de biodiversité. De plus, l’agriculture est responsable de 20 à 25 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
En remettant le vivant au cœur des choix de société, sa restauration et sa préservation au centre des politiques agricoles, il est démontré qu’un cercle vertueux est possible, avec des agriculteur.rices qui ne tombent plus malades, des écosystèmes diversifiés et dynamiques, une eau et un air plus sains pour tous les êtres vivants !
TÉLÉCHARGER LES PHOTOS DE L’ÉVÉNEMENT