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Conserver les pollinisateurs

Sortis de l’oeuf, les besoins spécifiques des petits pollinisateurs

D'abord œufs puis larves ou chenilles, nymphes, pupes ou chrysalides, avant de se métamorphoser en adultes, les insectes traversent plusieurs phases. A chaque étape, des besoins spécifiques et peu connus qui révèlent toute la complexité du vivant et apportent la preuve que les écosystèmes doivent être restaurés et préservés dans leur ensemble.

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Date : 14 février 2019

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REPRODUCTION, PONTE ET NIDS PROTECTEURS

Brassage pour des petits costauds  

La reproduction des insectes est essentiellement sexuée inra.fr. Mâles et femelles s’accouplent, et la combinaison de leurs patrimoines génétiques respectifs donne naissance à un nouvel individu. Pour se déplacer et se rencontrer, les individus de la même espèce ont besoin de corridors écologiques reliant leurs différents habitats. Ils peuvent ainsi s’accoupler et enrichir le patrimoine génétique des générations suivantes. Une population d’insectes isolée ne bénéficie plus de brassage génétique, elle s’appauvrit génétiquement et risque de décliner. Elle va perdre ses facultés d’adaptation aux maladies, aux aléas climatiques…

Rencontres aériennes, cadeaux et danse

Les pollinisateurs les plus romantiques préfèrent un environnement fleuri ou feuillu pour se reproduire. Les hyménoptères sociaux, tels que les abeilles, s’envoient en l’air au sens propre : la future reine quitte le nid au cours de l’été pour s’accoupler en vol avec les faux-bourdons qui la convoitent. Grâce à sa spermathèque, elle peut collecter la semence de plusieurs mâles, qui eux, mourront après l’accouplement.

Quant au papillon, il est irrésistiblement attiré par les phéromones sexuelles émises par la femelle. Il vole alors à sa rencontre et effectue une petite danse qui tient lieu de parade nuptiale. Chez certaines espèces de mouches, comme les Empididés (famille de diptères), l’accouplement est précédé d’un vol nuptial en essaim, au cours duquel le mâle offre un cadeau (cocon contenant un insecte, pétale de fleur…) à la femelle qu’il convoite.

LA PARTHENOGENESE :

Certains insectes peuvent se reproduire par parthénogenèse (abeilles communes, fourmis…): les femelles pondent des œufs non fécondés, qui donneront naissance exclusivement à des mâles (parthénogenèse arrhénotoque), des femelles (parthénogenèse thélytoque) ou parfois les deux (deutérotoque).

 

La femelle des guêpes solitaires choisit de féconder ses œufs en fonction de son environnement et des ressources à sa disposition. Si la réserve de nourriture pour la future larve est importante, elle pondra un œuf fécondé, qui donnera naissance à une femelle. Sinon, ce sera un mâle, plus petit et moins gourmand.

Nids protecteurs et plantes savoureuses usherbrooke.ca:

Avant de pondre, l’abeille sauvage terricole (les andrènes ou les halictes par exemple) creuse des galeries dans le sol. Elle fabrique à l’intérieur des cellules et dépose dans chacune un œuf et une réserve de pollen et nectar destinée à la future larve. Certains bourdons terrestres profitent également des trous de lombrics ou des nids de rongeurs abandonnés pour y fabriquer leurs nids Brisson et al 1994.

Les femelles des guêpes des sables (Bembex) creusent des tunnels de vingt centimètres dans le sol sableux pour y établir leur colonie. Elles approvisionnent le couvain avec des insectes pour nourrir les futures larves et restent fidèles à leur site de nidification : elles reviennent pondre au même endroit chaque année, à condition que leur environnement soit préservé.

Les abeilles sauvages xylicoles « squattent » les galeries creusées par d’autres ou creusent leurs nids dans du bois mort ou ouvragé, des tiges creuses (abeilles caulicoles) comme les roseaux ou à moelle (abeilles rubicoles) comme le sureau ou le fusain. Les abeilles charpentières comme Xylocopa violacea peuvent creuser des tunnels de plusieurs dizaines de centimètres dans le bois mort, avant d’y pondre leurs œufs.

Certaines abeilles sauvages à « nid libre » vont pondre dans les anfractuosités d’un muret de pierres sèches, ou dans les nids d’autres pollinisateurs, comme le fait l’abeille coucou…

Confection en pétale, résine ou papier mâché

Les abeilles maçonnes (Osmia cornuta) mélangent de la terre, du sable et de la salive pour confectionner les cloisons entre les cellules, et collent un bouchon d’argile pour protéger l’entrée.

L’anthocope du pavot, elle, tapisse les parois de son nid de pétales de coquelicot. Les abeilles tapissières, comme Megachile rotundata, découpent des morceaux de feuilles pour l’aménager.

Les abeilles cotonnières telle que Anthidium manicatum, récoltent des fibres végétales (les poils des feuilles, par exemple) pour isoler leurs cellules et refermer l’entrée de leur tunnel. Les guêpes, elles, utilisent les fibres végétales et de la salive pour fabriquer le papier mâché qui servira à construire leurs nids. Certaines abeilles préfèrent investir des coquilles d’escargots vides.

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Des hôtes comestibles pour les papillons

Les papillons ne construisent pas de nid et pondent leurs œufs sur les feuilles de plantes « hôtes » despapillonsdansmonjardin.wordpress.com, dont se nourriront les futures chenilles. L’ortie est la plante hôte de nombreux papillons : le Vulcain, la Petite Tortue, le Robert le Diable, le Paon de Jour, la Belle Dame…

Les syrphes, eux, pondent sur les plantes abritant d’importantes colonies de pucerons. Les larves vont dévorer entre 700 et 1200 pucerons durant deux semaines environ, avant leur métamorphose en adulte fredonpaca.fr.

Les femelles cétoines dorées pondent dans les déchets végétaux. Les larves se nourrissent ensuite de végétaux morts : compost, litières de feuilles mortes et autres matières organiques en décomposition.

Des oeufs en milieu aquatique

Les larves de syrphes eucéphales se développent dans l’eau (flaques, lacs etc)… Elles assurent un rôle d’épurateur en consommant les micro-organismes et déchets organiques, et filtrent jusqu’à 2 litres d’eau par jour chezleperemagraine.com.

De l’œuf à l’imago, une vie de pollinisateur

 

Les insectes se développent en plusieurs phases successives : d’abord œuf puis larve ou chenille, avant le stade nymphe, pupe ou chrysalide, au cours duquel ils vont se métamorphoser en adulte (imago). Ce cycle complet peut prendre quelques semaines, ou quelques mois. Le record est détenu par la chrysalide du papillon Prodoxus y-inversus, ou fausse-teigne des yuccas : Installée dans les zones arides du sud-ouest américain, elle attend des conditions climatiques favorables pour sortir et peut survivre ainsi 19 ans dans son cocon.

 

Chez les insectes sociaux, les ouvrières meurent généralement au bout de quelques semaines, mais les reines peuvent survivent plusieurs années. Les reines Lasioglossum marginatum, une espèce d’abeilles sauvages, vivent 5 ans, leurs ouvrières, un an Livre « Secrets d’insectes, 1001 curiosités du peuple à six pattes »..

 

Chez les insectes solitaires, le stade de larve et nymphe représente la majeure partie de leur durée de vie. Une fois adulte, l’insecte va se reproduire puis mourir rapidement , comme c’est le cas pour les femelles abeilles sauvages solitaires. Certaines collètes d’Afrique du sud ne vivent pas plus de quelques heures au stade adulte.

 

Les papillons peuvent vivre quelques semaines, voire seulement quelques jours. Certains ne se nourrissent  plus une fois adulte, ils n’ont même pas de pièces buccales. D’autres hibernent en forme adulte, comme le citron, qui peut vivre neuf mois. Il passe l’hiver, caché dans un arbre, en vie ralentie. Les coccinelles, elles, vivent un an en moyenne.

REPAS DES LARVES ET DES CHENILLES

Miel, bouillie ou pain…

Les larves des abeilles domestiques sont nourries de miel, ou de gelée royale pour les futures reines. Les femelles des abeilles sauvages fabriquent des « pains d’abeilles », un mélange de pollen, de nectar et de salive qu’elles déposent aux côtés de chaque œuf, pour nourrir la future larve, avant de sceller la cellule.

Les guêpes nourrissent leurs larves de bouillie d’insectes. Comme les abeilles, elles possèdent deux estomacs : le premier pour leur digestion propre, et le second, appelé « jabot social » pour pré-digérer et régurgiter la nourriture destinée aux larves.

Insectes vivants, bois et excréments

Les guêpes du bois femelles (Sirex géant, Urocerus gigas) percent avec leur ovipositeur (organe situé sous leur abdomen ou tarière) de petits trous dans les troncs de conifères affaiblis ou fraîchement abattus, et y pondent leurs oeufs. Les micro-lésions génèrent un afflux de résine de l’arbre, qui forme un bouchon et protège les œufs. Au moment de la ponte, les œufs se trouvent enduits des spores d’un champignon capable de dégrader le bois. A l’éclosion, les larves se nourrissent des substances produites par ce champignon, qui leur permettent de digérer le bois dans lequel elles se développent inra.fr.

Les femelles des Térébrants (hyménoptères) sont parasitoïdes, et pondent leurs œufs dans d’autres insectes ou dans des araignées inra.fr, qui serviront de repas aux larves. De nombreuses espèces sont utilisées en lutte biologique, comme les Trichogrammes, de minuscules guêpes qui pondent dans les œufs de la Pyrale du maïs, la Pyrale du buis ou encore le carpocapse de la pomme, des papillons dont les chenilles sont considérées comme des menaces pour les cultures et les vergersCourrier de l’environnement de l’INRA, Nicole Hawlitzky, 1992
inra.fr
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Les larves des éristales se nourrissent de matière organique en décomposition, et jouent un rôle important dans la production d’humus. Les Volucelles quelestcetanimal.comspipoll.org(Volucella zonaria) squattent les nids de frelons pour se nourrir de leurs déchets, insectes morts et débris.

Les larves des mouches (diptères) assurent un rôle clef dans la décomposition de la matière organique : elles se nourrissent de déchets et d’excréments qu’elles transforment en engrais.

Des chenilles gourmandes et leurs plantes hôtes

Les chenilles des papillons ont beaucoup d’appétit, certaines vont multiplier leur poids par mille en deux semaines. Elles trouvent leur repas sur la plante  où elles ont été pondus à dessein : les feuilles de brassicacées pour la Piéride du chou, les fabacées pour l’Azuré de la luzerne, etc. Sans ces plantes hôtes, les papillons ne peuvent compléter leur cycle de développement et assurer leur activité de pollinisation.

Les papillons du yucca ne se nourrissent qu’au stade larvaire. Les femelles percent la base de la fleur pollinisée pour pondre leurs œufs dans la cavité qui contient les ovules de la plante (es) Laura Rentería et César Cantú, « El efecto de Tegeticula yuccasella Riley (Lepidoptera: Prodoxidae) sobre la fenología reproductiva de Yucca filifera Chabaud (Agavaceae) en Linares, N.L., México », Acta Zoológica Mexicana (nueva serie), Xalapa, México, s.n., no 89,‎ 2003, p. 85-92 (ISSN 0065-1737, lire en ligne [archive] [PDF]). , qui se transformera en fruit après fécondation. Lorsque les larves éclosent, elles consomment une partie du fruit, à l’intérieur duquel elles se trouvent, puis en sortent, tombent sur le sol et forment leur pupe, dans laquelle elles passeront l’hiver.