Transparence et démocratie
L’extrême droite : un danger aussi pour la nature et ceux qui la défendent
Le deuxième tour des législatives pourrait propulser l’extrême droite à la tête du gouvernement français. Face à ces élections historiques, POLLINIS, une association farouchement apartisane, qui se bat depuis treize ans au nom des citoyens et citoyennes pour une agriculture respectueuse du vivant et pour stopper l'extinction des pollinisateurs et de la biodiversité, a pourtant rejoint les appels d’associations comme la Ligue des droits de l’Homme à faire front contre l’extrême droite. Nicolas Laarman, Délégué général de POLLINIS, explique ce positionnement.
« L’extrême droite va défaire un à un les garde-fous institutionnels et démocratiques »
– Nicolas Laarman, Délégué Général de POLLINIS
Chez POLLINIS, nous pensons que les dérives anti-démocratiques que nous avons observées et subies ces dernières années – la surveillance et la répression des idées et des citoyens engagés pour sauver le vivant et sécuriser l’alimentation et l’environnement des générations à venir – vont être dramatiquement renforcées par l’extrême droite. Tout est déjà en place, encouragé par les précédents gouvernements : les technologies de surveillance et de contrôle, et une ébauche de cadre légal. Au prétexte d’une « guerre civile » ou d’un « terrorisme vert » imaginaires, l’extrême droite va défaire un à un les garde-fous institutionnels et démocratiques qui ont jusqu’ici permis aux citoyens français et européens d’assurer la défense de leurs droits fondamentaux.
Nous pensons qu’une arrivée de l’extrême droite au pouvoir, quels que soient les espoirs habilement suscités chez des Français désespérés par les précédentes politiques, n’apportera, à terme, non pas l’ordre promis, mais le chaos, l’autoritarisme aveugle qui en découle, et l’accroissement dramatique d’une dette morale et financière contractée par un système de production alimentaire en faillite, dont le poids écrasant sera porté par les générations à venir.
Ces générations héritent d’une agriculture au bord de la rupture, qui n’est plus destinée à nourrir mais à produire des biens monnayables sur les marchés financiers ; une agriculture vulnérable, dépendante d’hydrocarbures, de machines, de produits chimiques et de semences fabriqués et détenus par des firmes étrangères ; une agriculture qui repose sur l’utilisation massive de substances chimiques destructrices des écosystèmes – qui sont pourtant les moyens de production de demain – et qui ont tant contaminé nos terres et nos rivières que les spécialistes quantifient en centaines de milliards d’euros les coûts de dépollution qui devront être assumés par la collectivité.
Il est impératif de faire le procès du système politique et réglementaire qui a permis pendant des décennies de faire autoriser ces produits toxiques qui ont décimé le vivant et nuit à la santé des agriculteurs et de leurs proches, tout en faisant peser le poids de la responsabilité sur la collectivité plutôt que sur les grandes corporations qui en ont sciemment profité.
Il faut un gouvernement à la hauteur des enjeux. En mesure d’imputer les responsabilités, et d’enclencher les démarches nécessaires pour faire évoluer collectivement et démocratiquement notre système alimentaire pour un système juste, respectueux du vivant, transmissible et nourricier.
Quel que soit le sujet, l’extrême droite et de plus en plus de partis « républicains » font le choix de désigner des boucs émissaires à la vindicte publique, au lieu de pointer courageusement les vraies responsabilités. Sur l’agriculture, les élu·es de ces partis n’osent pas reconnaître la responsabilité des multinationales et des lobbys agro-industriels dans l’effondrement de la biodiversité, ou dans la crise profonde qui ébranle notre modèle agricole. Ils et elles préfèrent rendre les écologistes et les quelques mesures obtenues en faveur du vivant, après des décennies de combats, publiquement responsables des difficultés systémiques dont souffrent les agriculteurs. Cette injustice, cette lâcheté, ces dérives préoccupantes, nous entendons les combattre pied à pied.
Ce que POLLINIS et les citoyens doivent sauver aujourd’hui, s’ils veulent pouvoir sauver la biodiversité, le système de production alimentaire et la beauté du monde qu’ils laisseront aux générations futures, ce sont d’abord les libertés fondamentales chèrement acquises au cours de leur histoire tourmentée. Elles sont plus que jamais nécessaires à l’épanouissement des individus et des sociétés, et indispensable aux choix collectifs éclairés dont nous avons dramatiquement besoin aujourd’hui.
Une défaite de l’extrême droite aux législatives ne garantirait aucunement une mise en œuvre immédiate des réformes indispensables dont les écosystèmes et l’agriculture ont besoin. Mais sa victoire les compromettrait radicalement.
– Nicolas Laarman, co-fondateur et Délégué général de POLLINIS