LE PROJET

Les pratiques d’arrachage de haies de l’agriculture conventionnelle ont contribué à transformer les paysages agricoles en déserts sans vie. En France, 70 % des haies existantes au début du XXe siècle ont aujourd’hui disparu. Et l’arrachage se poursuit, à un rythme moyen de 23 000 kilomètres par an entre 2017 et 2021. Pourtant, un réseau dense de haies peut héberger jusqu’à une centaine d’espèces d’insectes différentes et offre les conditions indispensables à la préservation de la biodiversité en milieu agricole.

En rapatriant les insectes dans les champs, la reconstruction du bocage agricole  entraîne dans son sillage le retour de toute une faune indispensable à l’équilibre des écosystèmes, comme les oiseaux, les petits mammifères, ou encore les auxiliaires de cultures, ces organismes vivants qui régulent les populations de ravageurs et préservent la santé des plantations.

Pour accompagner l’indispensable restauration des paysages agricoles, POLLINIS a conclu un partenariat avec  l’Association française arbres champêtres et Agroforesteries (Afac-Agroforesteries) des Pays de la Loire. Ensembles, elles ont soutenu des agriculteurs installés en agriculture biologique ou en phase de conversion, en leur permettant de planter des haies attirantes pour les pollinisateurs sauvages et économiquement intéressantes. 14 agriculteurs ont pris part à ce projet en 2019.

« EN PLUS DE LA QUESTION DES HAIES, LE PARTENARIAT AVEC POLLINIS PERMET DE SENSIBILISER LES AGRICULTEURS À L’IMPORTANCE DES POLLINISATEURS ET DE LA FAUNE AUXILIAIRE. CELA PERMET DE METTRE EN PLACE DES ACTIONS QUI FAVORISENT LES HABITATS POUR LES INSECTES. »

Margaux Boisramé, chargée de mission Environnement à Mission Bocage.

RESTAURER LES PAYSAGES AGRICOLES

Des paysages agricoles défigurés

Au début du XXème siècle, la France comptait près de 2 millions de kilomètres de haies. Depuis cette apogée du bocage français, 65 % des haies ont été détruites. Il ne reste plus aujourd’hui que 750 000 kilomètres de haies dans la campagne françaisePhilippe Pointereau et Didier Bazile, (1995), Arbres des champs., et chaque année 8 500 km de haies disparaissent encore11 500 km de haies disparaissent chaque année et 3 000 km sont plantées. La perte
nette est ainsi estimée à 8 500 km de haies par an.
.

Cette pratique d’arrachage systématique mise en œuvre par l’agriculture conventionnelle afin de créé d’immenses parcelles de monocultures, a uniformisé les paysages agricoles. Outre la disparition des haies, les arbres champêtres ont aussi été abattus, et les surfaces en prairies – paradis des fleurs sauvages – sont en net recul. En détruisant les habitats naturels des oiseaux, petits mammifères et insectes, ces pratiques ont fait chuter la biodiversité des champs.

Chute de la biodiversité

En quelques décennies, l’utilisation massive des pesticides et destruction des habitats naturels ont ainsi eu des effets délétères sur la biodiversité des aires cultivées. Privés de fleurs pour s’alimenter et nourrir leurs larves, d’arbres et arbustes où se réfugier, de sols non travaillés et non contaminés par les pesticides pour installer leur nid, les abeilles sauvages, papillons et autres insectes auxiliaires des champs sont dès lors condamnés à décliner.

Dans le sillage du déclin des pollinisateurs, qui constituent une ressource alimentaire et assurent l’existence des baies et graines, les oiseaux ont également vu leur population décroitre de 15 % dans les zones agricoles françaises en quinze ans. Certaines espèces, comme l’alouette des champs ou la perdrix grise, ont même perdu respectivement 50 et 90 % de leurs effectifs en 25 ans, selon une étude réalisée dans une plaine céréalière des Deux-SèvresGeffroy L. (2018), Où sont passés les oiseaux des champs? CNRS Le Journal..

Les haies, indispensables aux pollinisateurs et aux agriculteurs

En replantant des haies sur leur exploitations, les agriculteurs permettent la reconstruction d’un environnement propice aux insectes pollinisateurs et au retour de la biodiversité. Les réseaux de haies offrent des sites de nidification ainsi que les ressources alimentaire (pollen et nectar de fleurs) indispensables aux insectes.

Les agriculteurs bénéficient également de cette recomposition, puisqu’ils sont en effet les premiers à avoir besoin d’une pollinisation importante. En effet, la fécondation de 75 % des plantes cultivées dépend – au moins en partie – des pollinisateurs, et certaines productions deviennent même plus rentables si les pollinisateurs sont à la fois nombreux et issus d’espèces variées. En 2019, des scientifiques du CNRS et de l’INRA ont ainsi  démontré qu’une pollinisation abondante, et gratuite, du colza par les abeilles domestiques et sauvages est bien plus avantageuse financièrement (jusqu’à 200 euros par hectare) que l’utilisation de pesticidesRui Catarino et al., 2019. Bee pollination outperforms pesticides for oilseed crop production and profitability. Proceedings of the Royal Society B..

LES GRANDS PRINCIPES DE LA PLANTATION DE HAIES

Ensemble, POLLINIS et l’Afac ont élaboré un cahier des charges dessinant les lignes directrices de ce projet, afin d’offrir « le gîte et le couvert » aux pollinisateurs.

  • Les haies qui sont plantées privilégient les essences locales, qui ont un cycle de développement synchrone avec celui des populations d’insectes locales et ont bien plus de chances de se développer efficacement et rapidement sur leur territoire. Ainsi, elles résisteront mieux aux pesticides ainsi qu’aux parasites et autres maladies.
  • Les agriculteurs qui s’engagent dans ce programme travaillent en agriculture biologique ou sont en phase de conversion : les pesticides sont bannis de leurs exploitations.
  • La diversification des essences plantées permettra de garantir une nourriture abondante toute l’année ou presque aux pollinisateurs.
  • L’agroforesterie est privilégiée quand elle est possible. En plus de favoriser la biodiversité, elle permet aux agriculteurs de ne pas être dépendants d’une seule culture.
  • L’ébranchage des arbres têtards permet d’assurer leur vigueur et favoriser la régénération des haies existantes.
  • L’Afac s’engage à un accompagnement des agriculteurs sur la durée. Les plans de gestion des haies sont élaborés sur plusieurs années et le suivi se fait sur le long terme, afin d’aider les agriculteurs à mener des projets ambitieux de plantation et de restauration des paysages favorables aux pollinisateurs.

« NOUS VOULONS PLANTER UN KILOMÈTRE DE HAIE CETTE ANNÉE, AVEC UNE GRANDE DIVERSITÉ D’ESSENCES POUR ATTIRER LE PLUS DE POLLINISATEURS POSSIBLE. ILS SONT INDISPENSABLES POUR NOS PLANTES MÉDICINALES MAIS AUSSI POUR NOTRE FUTUR VERGER. ET CELA PERMETTRA AUX ABEILLES DE NOS RUCHES DE SE NOURRIR TOUTE L’ANNÉE. » 

Pauline Kaeuffer-Muller, Domaine de l’Yvardière, à Mareil-sur-Loir (Sarthe).

CE QUI A ÉTÉ FAIT

  • En 2019, 14 agriculteurs ont pris part au projet de POLLINIS et de l’Afac : 5 vignerons, 5 éleveurs et 4 cultivateurs de céréales, légumes et plantes médicinales.
  • En 2020, deux kilomètres de haies ont été plantés, soit 786 arbres non fruitiers et 475 arbres fruitiers.
  • D’anciennes haies ont retrouvé un second souffle grâce à des coupes garantissant la reprise végétale : autant d’actions qui sont bénéfiques pour la biodiversité ainsi que pour les agriculteurs d’un point de vue économique.

LES PARTENAIRES

Afac Pays de la Loire L’Afac Pays de la Loire a été créée en 2018 en complément des trois autres Afac régionaux déjà existants (Hauts de France, Normandie, Occitanie). Ce réseau regroupe les acteurs  locaux œuvrant en faveur des complexes bocagers. Sa mise en place a été initiée par l’association Mission Bocage située dans le Maine-et-Loire et spécialisée dans la plantation de haies. Depuis 1991, Mission Bocage a planté plus d’un million d’arbres dans les Mauges et le Choletais, et contribue activement à la valorisation de l’arbre champêtre sur le territoire. Avec l’association EIRL de la haie à la forêt, Mission Bocage assure la coordination technique des plantations de haies chez les agriculteurs financées grâce aux donateurs POLLINIS.

Haie mission bocage 2Quatorze agriculteurs ont reçu le soutien financier de POLLINIS et l’appui technique des membres de l’Afac pour ériger des haies favorables aux pollinisateurs, à l’instar de Xavier Amirault, vigneron à Saint-Nicolas-de-Bourgueil (Indre-et-Loire), Mickaël Delaunay, qui pratique une polyculture-élevage à Denée (Maine-et-Loire), ou encore Pauline Kaeuffer-Muller, qui cultive des plantes médicinales à Mareil-sur-Loir (Sarthe).

LE PROJET EN IMAGES

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Sur la ferme du Vivier, à Denée (Maine-et-Loire), Mickaël Delaunay pratique la polyculture-élevage (volailles et porcs). Son exploitation compte déjà plus de 4 km de haies, mais l’agriculteur souhaitait aller plus loin. Ces haies vont accueillir de nouvelles variétés d’arbres et arbustes pour diversifier les quatre ou cinq essences de bois qui constituent la majeure partie des haies existantes chez lui. Un panachage qui va permettre d’étaler sur l’année les ressources disponibles pour les différentes espèces de pollinisateurs.

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Yves Gabory, directeur de l’association Mission Bocage, au centre, présente les lignées d’arbres intraparcellaires plantées dans les champs de Mickaël Delaunay. Les plants, leur paillage et leurs protections contre les chevreuils ont été financés grâce au soutien des donateurs de POLLINIS. 

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Les haies existantes ont besoin d’un entretien adapté (recépage, êtétage, nettoyage…) pour retrouver toute leur vigueur.

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Mission Bocage a réalisé un diagnostic chez Mickaël Delaunay et prévu la plantation de 500 mètres de haies supplémentaires au cours des cinq années à venir. Une rallonge qui va permettre de connecter entre elles les haies existantes afin que les pollinisateurs puissent aisément circuler sur l’ensemble de la ferme et au-delà.

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Xavier Amirault est vigneron et il cultive en biodynamie les 34 hectares de vignes familiales du Clos des Quarterons à Saint-Nicolas-de-Bourgueil (Indre-et-Loire). 

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Il s’efforce depuis plusieurs années de réintroduire de la biodiversité pour que son milieu retrouve un équilibre et cherche à diversifier ses productions pour être moins dépendant des aléas d’une seule culture, précieuse, mais fragile, comme la vigne.

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Grâce au soutien financier de POLLINIS, Xavier Amirault a bénéficié de l’expertise de Cyrille Barbé, de l’association EIRL De la haie à la forêt, qui lui a proposé un plan de gestion des arbres et des haies après une étude minutieuse de l’exploitation.

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En concertation avec le vigneron, une centaine de mètres de haies ont été plantées, ainsi que des lignes d’arbres intra parcellaires pour développer l’agroforesterie. Dans son vignoble, Xavier Amirault n’a pas hésité à arracher des plants de vignes pour laisser la place à des arbres fruitiers. 

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MODES

MODES D'EMPLOI RÉGIONAUX POUR PLANTER DES HAIES FAVORABLES AUX POLLINISATEURS

POLLINIS publie une série de guides à destination des particuliers pour composer des haies favorables aux pollinisateurs en respectant les particularités locales et régionales.

C’EST UNIQUEMENT GRÂCE AUX DONS DES CITOYENS QUE
POLLINIS PEUT SOUTENIR DES PROJETS POUR RÉTABLIR DES MILIEUX FAVORABLES AUX POLLINISATEURS SAUVAGES.

AIDEZ-NOUS À ENRAYER L'EXTINCTION DES POLLINISATEURS

Photos : ©POLLINIS – ©Afac-Agroforesteries – ©Mission Bocage – ©Adobe Stock – © L. Chevalier / Shutterstock