Pesticides
Exportation des pesticides interdits : Bruxelles répond à la société civile
De nombreux pesticides illégaux en Europe en raison de leur dangerosité avérée continuent d’être produits et exportés vers des pays tiers. Interpellée dans un courrier par 76 organisations, dont POLLINIS, la Commission européenne affirme dans sa réponse envisager une révision de la législation pour mettre fin à cette politique inadmissible.
L’Europe va-t-elle enfin réagir face au scandale de l’exportation des pesticides interdits ? Interpellée dans une lettre co-signée par 76 organisations, dont POLLINISLire notre dépêche:« 76 ONG demandent la fin de l'exportation des pesticides interdits en Europe », la Commission a répondu aux demandes de la société civile portant sur les exportations des pesticides non autorisés par la réglementation européenne vers d’autres pays aux législations moins protectrices.
Dans ce courrier adressé le 5 novembre au vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans, ainsi qu’aux commissaires Stella Kyriakides (Santé), Janusz Wojciechowski (Agriculture) Virginijus Sinkevičius (Environnement), les organisations signataires pointaient du doigt l’incohérence de l’Europe qui continue de produire, stocker et vendre des pesticides dont elle interdit l’utilisation sur son territoire, en raison de leur dangerosité avérée pour la santé humaine et pour l’environnement.
Un cercle vicieux
Selon un rapportPesticides interdits : plus de 80 000 tonnes exportées depuis l’UE, dont un tiers par Syngenta. Public Eye des ONG Public Eye et Unearthed, 41 pesticides interdits ont été déclarés à l’exportation depuis 11 pays membres de l’Union européenne en 2018. Ces pays ont ainsi exporté plus de 81 000 tonnes de pesticides contenant des substances interdites en Europe, comme le paraquat, un herbicide extrêmement toxique, ou le dichloropropène, classé comme cancérogène probable.
Ces pesticides interdits reviennent ensuite en Europe sous la forme de résidus dans les produits agricoles importés depuis les pays en développement ou émergents comme le Maroc, l’Ukraine ou le Brésil, où l’Europe commercialise ses substances dangereuses.
Dans son courrier, la Commission a répondu aux deux principales demandes relayées par les 76 organisations : arrêter l’exportation de pesticides qui ne sont plus autorisés dans l’Union européenne et l’importation de produits agricoles traités avec ces substances chimiques. La réponse fait toutefois l’impasse sur la demande concernant l’élimination progressive des pesticides dangereux à l’échelle mondiale.
Réponse parcellaire
La Commission a indiqué qu’elle étudiait les différentes options à mettre en œuvre pour atteindre l’objectif de prévention des exportations de produits chimiques dangereux « y compris une révision de la législation ». L’exécutif européen a aussi souligné avoir commencé à tenir compte des préoccupations suscitées par les tolérances à l’importation de produits agricoles traités aux pesticides interdits, sans toutefois donner de précisions sur les actions concrètes envisagées.
« Les réponses apportées par la Commission européenne sur l’exportation des pesticides permettent d’espérer que l’Europe mettra prochainement fin à ce scandale environnemental et humain, explique Nicolas Laarman, délégué général de POLLINIS. Mais l’absence de réponse tangible sur l’élimination progressive des pesticides dangereux à l’échelle mondiale et le manque d’engagement concret sur le retour des produits traités avec ces pesticides interdits montrent que le chemin à parcourir reste long pour construire une agriculture respectueuse de l’environnement et non-dépendante de la chimie », conclut-il.