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Pesticides / Néonicotinoïdes

Retour des néonicotinoïdes : les députés tournent le dos aux pollinisateurs

Les députés ont voté le 6 octobre le projet de loi permettant aux betteraviers de déroger à l’interdiction des néonicotinoïdes jusqu’en 2023. Un recul environnemental catastrophique pour la France qui les avait pourtant interdits en 2016 pour endiguer le déclin des pollinisateurs, garants de la sécurité alimentaire.

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Date : 8 octobre 2020

Les députés ont balayé d’un revers de main des années de combat pour faire interdire les néonicotinoïdes, en adoptant le 6 octobre le projet de loi permettant de déroger à cette interdiction jusqu’en 2023. Un grave retour en arrière, alors que l’interdiction des néonicotinoïdes adoptée en 2016 devait être définitive en France depuis 2018.

Les résultats sans appel de ce vote (313 pour, 158 contre et 56 abstentions), révèlent qu’une majorité d’élus a privilégié les intérêts de l’agro-industrie au détriment de la préservation des abeilles et de la biodiversité.

Cette loi a été élaborée par le gouvernement sous pression de la filière betterave-sucre, qui a exigé le retour de ces insecticides en enrobage de semence après une campagne aux rendements marquée par le virus de la jaunisse, mais aussi par la sécheresse.

Assemblée nationale

Quatre ans après avoir adopté l’interdiction des néonicotinoïdes en France, l’Assemblée nationale a rouvert la porte à ces pesticides tueurs d’abeille le 6 octobre.

Des arguments mensongers

Pourtant, l’usage de ces insecticides ne résoudra en rien les problèmes que rencontre la filière betteravière, déjà mise à mal bien avant la jaunisse de 2020 par la suppression en 2017 des quotas de sucre européens avec un prix garanti, qui a engendré une chute des prix sur un marché mondial très concurrentiel. Les grands acteurs de la filière sucre entendent poursuivre leur fuite en avant, avec un prix de la betterave toujours plus bas, qui impose aux agriculteurs une obligation de rendement intenable.

De son côté, le gouvernement s’est largement appuyé sur l’argumentaire mensonger des betteraviers afin de minimiser les risques sur l’environnement et décrédibiliser toute alternative au néonicotinoïdes.

Depuis le mois d’août, aux côtés d’une trentaine d’organisations, POLLINIS n’a eut de cesse de dénoncer ce projet de loi en interpellant les parlementaires et le ministre de l’Agriculture, en dénonçant les multiples contre-vérités répandues par la filière betterave-sucre sur l’absence d’alternatives aux néonicotinoïdes, ou encore en manifestant sur l’esplanade des Invalides aux côtés des nombreux autre défenseurs de l’environnement. Près de 70 000 citoyens de la France entière ont interpellé directement leurs députés en utilisant l’outil de pétition de POLLINIS, pour leur demander de s’opposer au retour des néonicotinoïdes en France.

« Grâce à la mobilisation citoyenne, le gouvernement a dû circonscrire la possibilité d’utiliser ces produits uniquement aux betteraviers, quand le projet de loi initial permettait à tous les producteurs de demander ces dérogations, rappelle Nicolas Laarman, délégué général. C’est toujours ça… Mais on voit bien que les élus ne parviennent pas à résister aux pressions des tenants de l’agriculture intensive ».

Des alternatives existent

Alors que le gouvernement s’était défendu de tout « renoncement écologique », POLLINIS déplore au contraire le choix d’une politique de court-terme, pour soutenir à grand renfort de chimie un système conventionnel à bout de souffle, quand des solutions économiques et agronomiques alternatives existent pour accompagner les agriculteurs.

« La seule réponse adéquate pour garantir la souveraineté et la sécurité alimentaire est un plan de transition agricole ambitieux, sur un modèle agroécologique respectueux de la nature, résilient face au changement climatique, en accompagnant la conversion des agriculteurs et en les protégeant », insiste Nicolas Laarman.

Les néonicotinoïdes avaient été interdits en France en raison de leur extrême toxicité pour les abeilles. Leur impact dévastateur sur les écosystèmes, leur dissémination incontrôlable dans l’environnement et leur persistance à long terme ont été démontrés par des centaines d’études scientifiques.

S’il est confirmé par le Sénat, le vote de cette dérogation pour les betteraviers va autoriser la contamination de plus de 400 000 hectares de terres par des produits 7 000 fois plus toxiques pour les abeilles que le DDT, avec des conséquences dramatiques pour les pollinisateurs sauvages, les vers de terre, les oiseaux, les crustacés… Le retour des néonicotinoïdes ne peut qu’accélérer le vertigineux déclin des insectes : en 2017, une étude annonçait que plus de 80 % de la biomasse des insectes ailés avaient disparu en moins de 30 ans en Europe.

Face à cette loi contraire au principe de non régression du droit de l’environnement, et à la charte de l’environnement, POLLINIS va poursuivre la mobilisation contre cette ré-autorisation scandaleuse.