fbpx

Pesticides / SDHI

Boscalid : POLLINIS attaque en justice le système de prolongation abusif des pesticides

Date : 23 février 2023

Paris, le 22 février 2023. POLLINIS attaque en justice la prolongation de mise sur le marché accordée au boscalid par la Commission européenne. Le cas de ce fongicide SDHI, dont la commercialisation aurait dû expirer en 2018, est emblématique du dévoiement du système de réévaluation des pesticides en Europe, où plus d’un tiers des 453 substances actives autorisées bénéficient de prolongations abusives.

Le 16 février, POLLINIS a déposé un recours devant le Tribunal de l’Union européenne pour remettre en cause la prolongation, pour la cinquième année consécutive, de l’autorisation de mise sur le marché du boscalid, un fongicide SDHI commercialisé par BASF.

Bien que les risques sanitaires et environnementaux de ce pesticide soient avérés depuis l’alerte lancée par un collectif de chercheurs et de scientifiques en 2018, la Commission européenne a décidé de prolonger, encore une fois, sa commercialisation dans l’UE – qui aurait dû expirer en 2018, et a refusé la demande de réexamen interne déposée par POLLINIS en juillet 2022.

« La prolongation accordée au boscalid et le refus de la Commission de révoquer cette décision illustrent les dérives d’un système européen qui prolonge indéfiniment et systématiquement les autorisations des pesticides en dépit de leurs risques pour la santé et l’environnement, et au mépris du principe de précaution », explique Nicolas Laarman, délégué général de l’association.

Par exemple, le règlement prolongeant l’approbation du boscalid a également prolongé celles de 49 autres substances actives, parmi lesquelles le S-métolachlore, dont l’ANSES  vient d’interdire les principaux usages en France ce 15 février 2023, en raison d’une contamination des eaux souterraines bien supérieure aux seuils autorisés. Son approbation dans l’UE est pourtant systématiquement prolongée depuis plus de 8 ans par la Commission européenne.

Au total, ce sont 180 substances actives, dont 119 pesticides de synthèse, qui bénéficient à ce jour de prolongations abusives sur les 453 substances autorisées.

Ce système de prolongations découle d’une interprétation biaisée et abusive de l’article 17 du règlement relatif à la mise sur le marché des produits phytosanitaires, qui permet de prolonger temporairement une autorisation de mise sur le marché lorsque l’évaluation nécessaire au renouvellement de cette autorisation n’a pu être conduite à temps, et si le retard est dû à « des raisons indépendantes de la volonté du demandeur » (Art. 17).

« En interprétant l’article 17 comme elle le fait, la Commission européenne octroie des prolongations d’autorisations en ignorant complètement les risques sanitaires et environnementaux que peuvent poser les substances actives », alerte Julia Thibord, responsable du contentieux stratégique de POLLINIS. Au regard des dispositions et des objectifs du règlement et du principe de précaution, soit cette interprétation est illégale, soit l’article 17 lui-même est illégal

Autre manquement, la prolongation d’approbations sans évaluation réelle de la responsabilité du fabricant dans le non-respect des délais. Concernant la cinquième et dernière extension du boscalid, la Commission reconnaît elle-même, dans sa réponse à la demande de réexamen interne de POLLINIS, ne pas avoir enquêté sur le rôle qu’a pu jouer BASF dans l’ajournement du réexamen de son pesticide.

« Les prolongations prévues par le règlement 1107/2009 constituent une mesure de transition, et ne peuvent en aucun cas être utilisées de manière successive et infinie, en particulier au regard du principe de précaution », conclut Julia Thibord.

 

 LIRE NOTRE RAPPORT