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Biotechnologies génétiques / Nouveaux OGM

L’Anses reconnaît les risques des OGM, la France doit rejeter leur dérégulation

Date : 6 mars 2024

L’Anses confirme aujourd’hui, dans un second avis consacré aux plantes issues des NTG, que les nouveaux OGM posent des risques environnementaux et sanitaires. L’agence sanitaire insiste ainsi sur la nécessité de les évaluer avant toute autorisation de mise sur le marché, alors que la Commission et le Parlement européens souhaitent précisément faire le contraire. L’ONG POLLINIS demande à la France de rejeter le projet de réglementation au Conseil de l’Union européenne, pour protéger ses agriculteurs, les citoyens et l’ensemble du monde vivant.

Dans un avis publié après plusieurs semaines de blocage gouvernemental, l’Anses confirme aujourd’hui les risques environnementaux et sanitaires des plantes issues des nouvelles techniques génomiques (NTG) et souligne la nécessité de les évaluer au cas par cas avant d’en autoriser la commercialisation. Le projet de réglementation de la Commission européenne, et la version adoptée par le Parlement ce 7 février 2024, proposent pourtant d’exempter l’écrasante majorité des nouveaux OGM de toute évaluation des risques. POLLINIS, qui travaille à la protection des pollinisateurs et de l’ensemble de la biodiversité qui en dépend, demande au gouvernement de prendre acte de l’avis de l’agence sanitaire et de rejeter le projet de réglementation dans le cadre des négociations en cours au Conseil de l’Union européenne.

« Ce nouvel avis vient s’ajouter aux conclusions accablantes du précédent. Alors que la Commission européenne enrobe ses discours de science et d’écologie, l’agence sanitaire française a rappelé, en l’espace de deux mois, le manque de fondement scientifique du projet de règlement de l’exécutif, ainsi que le risque inconsidéré que représenterait pour l’environnement et la santé la dissémination sans garde-fou de plantes modifiées dont on ignore encore l’étendue des impacts. La France, plutôt que de bloquer les avis de son agence sanitaire, doit s’opposer fermement à la dérégulation de ces OGM au Conseil de l’Union européenne », affirme Nicolas Laarman, délégué général de l’ONG POLLINIS.

Les experts de l’Anses mettent ainsi en évidence que les plantes issues de mutagenèse dirigée (induction ciblée d’une mutation) présentent non seulement de nouveaux risques (effets hors cible, effets pléiotropes), mais également des risques similaires à ceux des OGM traditionnels. Parmi les risques identifiés par les experts figurent notamment : 

  • Des risques de modification des interactions avec les animaux en contact avec les plantes issues des NTG : cela est particulièrement vrai pour les pollinisateurs qui visiteront leurs fleurs ;
  • Des risques de flux de gènes modifiés vers des populations sauvages, pouvant par exemple se répercuter sur des espèces envahissantes ou signer la fin de l’agriculture sans OGM dont la filière biologique ;
  • Des potentiels effets cumulés sur l’environnement à long terme liés à la culture de différentes variétés issues des NTG et à l’augmentation des surfaces de ces cultures ;
  • Et, concernant la santé, des problèmes potentiels de nutrition, d’allergénicité ou de toxicité en raison de modifications inattendues de la composition des plantes.

« Cet avis porte un coup fatal à un mythe soigneusement entretenu par la Commission européenne et les lobbys de l’agrochimie : le mythe de modifications génétiques naturelles et sans danger. L’Anses rappelle en effet qu’il est impératif d’évaluer les risques sanitaires et environnementaux des plantes issues des NTG et de prendre garde à leurs impacts cumulés sur l’environnement. Sans évaluation systématique des risques de ces OGM par une agence indépendante, ce projet de dérégulation doit être impérativement rejeté, au regard du principe de précaution et de la volonté des 540 000 citoyens français et européens s’y étant formellement opposés », déclare Charlotte Labauge, chargée de campagne de l’ONG POLLINIS. 

Les experts du groupe de travail rappellent en outre que l’importance donnée aux aspects techniques du projet de réglementation détournent l’attention de ses implications systémiques, sociales et éthiques. L’accroissement possible de la concentration du marché des semences, l’impossible coexistence avec l’agriculture biologique, ou encore les attentes de transparence de la part des consommateurs, constituent autant d’enjeux essentiels pour le futur de l’agriculture en Europe. Le groupe de travail et les comités d’experts spécialisés (CES) en concluent que « ces choix de société devraient faire l’objet d’une gouvernance structurée et démocratique ».

« Comment des décisionnaires européens, et en particulier des élus, peuvent-ils prendre la décision de relâcher dans l’environnement des plantes génétiquement modifiées dont les effets ne sont pas encore connus, sans débat démocratique et sans en rendre compte ? Il est clair, s’il fallait encore le prouver, que le projet de dérégulation des OGM sert avant tout les intérêts des firmes industrielles, et notamment de l’agrochimie, pourtant principale responsable des dérives sociales et environnementales de l’agriculture productiviste. De nombreux agriculteurs, en France et en Europe, cultivent déjà très efficacement sans pesticides ni OGM : ce sont ces modèles qu’il faut soutenir pour enrayer l’extinction du vivant et défendre notre souveraineté alimentaire », alerte Nicolas Laarman, délégué général de l’ONG POLLINIS.

L’Anses mentionne égalementla question du financement public lié aux NTG. Il est en effet probable que certaines plantes NTG considérées comme durables ne génèrent aucun bénéfice économique, et dépendent ainsi de la recherche publique pour leur développement. POLLINIS appelle donc à la plus grande vigilance quant au recours à l’intervention publique et alerte sur les risques que ces financements soient détournés pour profiter directement aux multinationales semencières.

Lire le rapport de l’Anses