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Pesticides / SDHI

SDHI – Anses : le gouvernement doit appliquer le principe de précaution.

Date : 8 décembre 2023


Ce mardi 5 décembre, l’Anses publiait le rapport du groupe de travail « SDHI » lancé en octobre 2020. Les conclusions soulèvent plusieurs points inquiétants. POLLINIS demande à nouveau au gouvernement d’appliquer le principe de précaution en suspendant l’autorisation de mise sur le marché de ces substances, en attendant que les recommandations du groupe de travail soient appliquées.

Le groupe de travail « SDHI » mis en place par l’Anses en octobre 2020 a rendu ses conclusions. Il a été créé après qu’une alerte ait été lancée en 2018 par plusieurs scientifiques, dont Pierre Rustin, directeur de recherche au CNRS et Paule Bénit, ingénieure de recherche à l’Inserm. Ils pointaient les risques liés au mode d’action particulier de ces fongicides inhibiteurs de la succinate déshydrogénase, une enzyme indispensable à la respiration cellulaire de presque tous les êtres vivants.

Le groupe de travail a analysé 14 substances actives SDHI, en se basant principalement sur les dossiers réglementaires soumis par les entreprises qui produisent et commercialisent ces pesticides. Malgré le ton rassurant de l’avis de l’Anses, les conclusions du groupe de travail soulignent plusieurs éléments inquiétants qui devraient pousser le gouvernement à retirer immédiatement les autorisations de mise sur le marché de ces substances :

  • Des effets importants sur de multiples organes (foie, thyroïde, glandes surrénales, système visuel et nerveux, reins, organes reproducteurs) ;
  • Des lacunes dans les dossiers réglementaires, concernant particulièrement l’évaluation des effets perturbateurs endocriniens, de la neurotoxicité et de la toxicité pour les reins ;
  • Le rapport précise que « les tests requis lors de l’évaluation des dossiers règlementaires de ces substances n’apparaissent ni adéquats, ni suffisants pour évaluer la toxicité spécifique des SDHI, au regard des données de la littérature ».

Le groupe de travail recommande notamment de mettre en place une évaluation spécifique de la mitotoxicité (effet des SDHI sur les mitochondries), d’améliorer les connaissances sur l’exposition des populations aux SDHI, et d’évaluer les effets des SDHI sur les écosystèmes et leur impact sur la biodiversité qui n’ont pas du tout été explorés par le groupe de travail. Sur la base des données disponibles, ce dernier souligne par ailleurs que « ces éléments suscitent des interrogations sur les risques que l’utilisation des SDHI peut représenter pour la santé des écosystèmes et la biodiversité, lesquels devraient être évalués de manière globale et approfondie. Le groupe de travail recommande la mise en place d’une expertise collective consacrée spécifiquement aux effets des SDHI et à l’évaluation des risques pour la biodiversité et la santé des écosystèmes ».

« Une évaluation des risques adaptée au mode d’action très particulier des SDHI et aux effets qu’ils provoquent sur la biodiversité devrait être un prérequis indispensable à leur autorisation de mise sur le marché français et européen, déclare Nicolas Laarman, délégué général de POLLINIS. Tant que ces recommandations du groupe de travail ne sont pas mises en place, POLLINIS demande au gouvernement d’appliquer un strict principe de précaution et de suspendre immédiatement les autorisations de mise sur le marché de tous les SDHI en circulation ».

L’avis des docteurs Laurence Huc et Anthony Lemarié, publié en annexe des conclusions de l’ANSES, fait par ailleurs état de nombreuses difficultés rencontrées pendant les travaux du groupe, et notamment d’omissions troublantes dans leurs conclusions qui limitent la portée de leurs recommandations.

POLLINIS mène en ce moment une campagne d’interpellation des ministres de la Santé, de l’Agriculture et de la Transition écologique, à laquelle ont déjà participé 50 000 personnes, ainsi qu’un recours devant le Tribunal de l’Union européenne contre la prolongation abusive de l’autorisation du boscalid sur le marché commun, une molécule SDHI dont la période d’homologation initiale a expiré en 2018.

Au niveau de l’Union européenne, POLLINIS a soumis en 2022 une première pétition au Parlement européen, faisant valoir que les protocoles actuels d’évaluation des risques ne sont pas adaptés au mode d’action spécifique de ces substances et sont donc largement inadaptés à l’évaluation des risques liés aux SDHI. À travers cette pétition, encore ouverte et soutenue par plusieurs eurodéputés, POLLINIS demande à la Commission européenne de renforcer les protocoles d’évaluation de la toxicité de ces substances.

Dans une autre pétition portée par l’ONG et soutenue par une trentaine d’eurodéputés, plus de 420 000 citoyens ont également demandé à la Commission européenne un retrait immédiat des SDHI du marché.